Le 8 octobre 2018 à Incheon (Corée du Nord), le Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a alerté sur les graves conséquences d’un réchauffement de plus de 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle.
Le réchauffement climatique est déjà là
Ce rapport, effectué à la demande des pays les plus vulnérables — c’est-à-dire les territoires qui risquent une submersion rapide — détaille ce qu’il se passerait si le climat venait à se réchauffer de 1,5 °C et plus. Or le constat est le suivant : nous en sommes déjà à + 1 °C en termes de réchauffement depuis l’ère préindustrielle.
Tout un équilibre existant se trouve déjà bouleversé par ces +1,0°C :
- des records de températures, et des vagues de chaleur se multiplient de par le monde ;
- idem pour les événements climatiques violents (pluies diluviennes, ouragans dévastateurs, inondations côtières) ;
- la banquise de l’océan Arctique, les glaciers voient leur surface diminuer ;
- les récifs coralliens sont fragilisés;
- et les sociétés vivant de la pêche artisanale le sont également…
Au rythme actuel, les +1,5 °C risquent d’être atteints dès 2030.
Pour un demi-degré de plus
Les modèles climatiques prévoient une aggravation des impacts sur les climats régionaux selon les scénarios +1,5 °C et +2,0 °C.
Augmentation de la température moyenne et des températures extrêmes, multiplication de fortes précipitations ou a contrario de grandes sécheresses selon les endroits, tout est bien plus marqué avec un réchauffement +2,0 °C.
Hans-Otto Pörtner, coprésident de cette session du Giec pense qu’un réchauffement planétaire de plus de 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle accroît le risque de changements irréversibles, quand à l’inverse, une limitation à 1,5 °C permettrait à la fois aux écosystèmes et aux sociétés humaines de s’adapter.
Le scénario +1,5 °C n’est par conséquent pas un scénario de sortie du réchauffement climatique, mais bien celui d’une limitation des dégâts par rapport à un dépassement ne serait-ce que d’un demi-degré supplémentaire.
À +1,5 °C, ce sont déjà des risques accrus pour la santé humaine (plus de chaleur, plus de moustiques, plus de dengue et plus de malaria), une diminution des rendements pour le maïs, le riz, le blé (risque alimentaire), et des difficultés d’approvisionnement en eau.
Avec +1,5 °C, le niveau des océans augmenterait déjà de plus de 70 cm d’ici 2100, contre plus d’un mètre avec +2,0 °C.
L’Arctique deviendrait libre de glace une fois par siècle, quand à +2,0 °C le phénomène serait visible une fois par décennie.
70 % des coraux pourraient disparaître avec +1,5 °C, 100 % avec un réchauffement de +2,0 °C.
À l’horizon 2050, ce sont des centaines de millions de personnes supplémentaires qui basculeraient dans la pauvreté avec +2 °C au lieu de 1,5 °C.
Ce demi-degré de différence est donc d’une importance capitale, à tous les niveaux.
Agir globalement pour éviter le pire
Les leviers pour limiter le réchauffement climatique touchent non seulement le secteur de l’énergie et des transports, mais aussi l’aménagement du territoire, l’industrie, le bâtiment, l’urbanisme. Tout se tient. Ce sont de véritables choix de société qui sont en jeu et qui nécessitent des transitions rapides, de grande envergure.
Sur le plan de l’énergie, pour que les émissions de gaz à effet de serre soient drastiquement réduites, il faudrait qu’en 2050 le charbon représente moins de 2 % de la production d’électricité quand dans le même temps, les énergies renouvelables devront en dépasser les 70 %. Plus nous agirons tôt, et moins l’effort financier sera important.
Cependant, selon le rapport, ce sont déjà quelque 2400 milliards de dollars d’investissements annuels qui seront nécessaires jusqu’en 2035 pour cette transformation des systèmes énergétiques, soit près de 3 % du PIB mondial !
De plus, si nous ne nous attaquons qu’à une dimension du problème, ces efforts déjà énormes seront vains.
Tout ce qui peut réduire l’impact des transports est à prendre en considération : plus collectifs, moins gourmands, avec des choix de société qui rendront les trajets moins longs ou moins fréquents, comme rapprocher les zones d’habitation des zones d’activités ou le développement du télétravail. Sans oublier, une meilleure conception des bâtiments, une industrie plus propre : tous les fronts doivent être combattus en même temps.
Le rapport alerte cependant sur les effets négatifs que pourraient avoir certaines stratégies sur d’autres secteurs. Par exemple, les terres affectées aux cultures destinées à la production de biocarburant ne sont plus disponibles pour produire de la nourriture. De même que l’abandon brutal des énergies fossiles ne peut être sans impact sur l’emploi et la pauvreté dans les régions qui en dépendent fortement.
Le groupement en appelle donc à des politiques de redistribution et à une diversification économique.
Si au final, nous échouons à évoluer en ce sens et à nous organiser drastiquement, nous risquons un réchauffement de plus de 3 °C d’ici à la fin du siècle. Soit bien au-delà du scénario déjà catastrophique des +2,0 °C.
Ce rapport est donc une sorte d’avertissement ultime qui nous rappelle que l’heure n’est plus à la tergiversation. L’avenir de notre planète dépend de notre capacité à nous entendre et agir vite, de manière globale. À nous collectivement de nous en assurer.